Le manga

On appelle manga (漫画) la bande dessinée japonaise, bien que le terme soit souvent employé de façon inappropriée pour nommer certaines œuvres audiovisuelles japonaises, telles que les anime (dessin animé japonais). Le mot manga, dont la traduction littérale serait dessin non abouti ou croquis, est employé au Japon depuis la fin du 18ème siècle. Lorsqu’un manga rencontre le succès, il est généralement adapté en anime ou même en série télévisée (dorama), voire en jeu vidéo. Il arrive toutefois qu’un anime rencontrant le succès soit adapté en manga (ex. Neon Genesis Evangelion). Un manga se lit généralement de droite à gauche, ce qui peut être perturbant pour les lecteurs occidentaux habitués aux normes internationales des bandes dessinées se lisant de gauche à droite, et ses pages sont habituellement en noir et blanc, bien qu’il arrive qu’elles alternent parfois avec une page en couleurs.

Un manga à succès est souvent adapté en anime

L’histoire du manga au Japon

Dans l’histoire du Japon, l’art de la narration à l’aide de dessins date de l’époque Nara (奈良時代), avec les rouleaux peints emakimono (絵巻物) qui associaient des kanji à des peintures, tel le célèbre emaki du Genji monogatari (源氏物語) dont on trouve un extrait sur le billet de ¥2000. A la période Heian (平安時代) apparurent les chōjū-giga (鳥獣戯画), caricatures anthropomorphiques de la faune réalisées à l’encre et sans texte narratif. Durant la période Edo (江戸時代), on commença à utiliser les estampes ukiyo-e (浮世絵) pour illustrer les livres. C’est à cette même époque que le célèbre Katsushika Hokusai (葛飾北斎) appela ses recueils d’estampes ‘hokusai manga‘, et c’est ainsi que le terme manga parvint en occident. L’ouverture au monde du Japon en 1868 lors de la révolution Meiji (明治維新),  fut accompagnée d’une forte modernisation sous influence occidentale, et les 1ères presses nippones créées sur le modèle de la presse anglo-saxonne. Le quotidien Shinbun Nishikie, créé en 1874, fut le premier à introduire des estampes dans ses pages. Par la suite apparurent les premiers dessins humoristiques et caricatures satiriques dans la presse nippone.

Un ‘mangaka‘ est un dessinateur de manga.

Le 1er manga considéré comme tel fut créé par le mangaka Kitazawa Rakuten (北澤楽天) en 1902, et publié dans le supplément du dimanche du journal Jiji Shinpō (時事新報). Il créa également divers magazines satiriques, souvent censurés pour leurs caricatures anti-gouvernementales. En 1908, il créa le magazine en couleurs pour enfants Furendo (フレンド) et en 1914 la revue Kodomo no tomo (子供之友) où il dessina l’enfance de Toyotomi Hideyoshi (豊臣秀吉), qui connurent tous deux un franc succès. En 1929, il entreprit un voyage en Europe, en Afrique et aux Amériques, et exposa en présence du célèbre peintre Fujita ‘Léonard’ Tsuguharu (藤田嗣治) lors d’un passage à Paris, où il fut décoré de la légion d’honneur.

Okamoto Ippei (岡本 一平), mangaka au quotidien Asahi Shinbun (朝日新聞), créé la 1ère association de mangaka en 1915, la Tokyo manga kai (東京漫画会) qui devient en 1923 le Nihon manga kai (日本漫画会) et en 1942 le Nihon manga hōkōkai (日本漫画奉公会).

En 1925, la ‘Loi de préservation de la paix’ est instaurée par le gouvernement, afin de censurer la presse japonaise.

En 1964, création de l’association des mangaka du Japon, le Nihon Mangaka Kyōkai (日本漫画家協会)

Durant la guerre sino-japonaise ainsi que la 2ème guerre mondiale, et à l’image d’autres nations, la presse nippone -manga inclus- se met au service de la propagande de guerre. A la suite de la capitulation du Japon et de son occupation, le manga subit l’influence américaine des comic strips diffusés massivement dans les quotidiens japonais, et la génération d’après-guerre voit se reconstruire l’archipel au prix de l’abandon de son idéologie et de certaines de ses valeurs. La suprématie et la puissance de l’armée américaine marquera fortement les esprits, et influencera fortement la future génération de mangaka.

C’est à partir du 20ème siècle que le terme manga prit le sens de bande dessinée, lorsqu’elle fut introduite au Japon, et grâce aux œuvres du mangaka Tezuka Osamu (手塚治虫) dans la période de l’après-guerre. Très influencé par Walt Disney et considéré comme le père du manga moderne, il a révolutionné le genre, introduisant des concepts nouveaux tels le mouvement souligné par des onomatopées et des effets graphiques et l’utilisation de plans et cadrages comme au cinéma, rompant avec la tradition classique qui présentait les personnages de plein pied au centre de l’image.

Un genre de manga nouveau appelé gekiga (劇画) – lit. œuvres dramatiques – apparait dans les années ’60, abordant des thèmes plus sérieux et réalistes, et destiné avant tout à un public adulte.

Enfin, le manga pour filles – shōjo (少女) – fait son apparition dans les années ’70, plus accentué sur les relations psychologiques des personnages, et se détachant du shōnen (少年), le manga pour garçons.

Caractéristiques d’un manga

Un manga est généralement en noir et blanc, mais ce n’est pas une règle absolue. Le fait est qu’un manga peu connu passe d’abord par sa publication dans des revues de 2nd plan peu coûteuses, aux pages de papier recyclé, et fait généralement partie d’une série de plusieurs volumes. Il comprend davantage de planches qu’une bande dessinée occidentale, allant d’une centaine à + de 200, contre une quarantaine pour une bande dessinée. Plus riche et moins statique concernant la narration, les techniques employées permettent de découper l’action en introduisant divers cadrages, plans et effets, proches des techniques cinématographiques, ainsi que de nombreuses onomatopées si présentes dans la langue japonaise. Les personnages de manga ont souvent des traits occidentaux et de grands yeux renforçant l’expression du visage, et l’accent est mis sur les émotions et sentiments des protagonistes à l’aide de divers codes graphiques. Contrairement à la retenue observée dans la société japonaise, les attitudes expressives sont exagérées à outrance, et le passage sans transition du registre absurde ou comique au drame ou au sérieux est courant.

les kanji d’un manga sont souvent accompagnés de furigana pour faciliter la lecture

Les différents types de manga

Il existe différents types de manga destinés à des publics différents (ou plusieurs à la fois), et abordant tous les genres et registres littéraires, du romantique à la science-fiction en passant par l’horreur ou encore en les mélangeant. Les références japonaises par rapport à la violence et au sexe n’étant pas les mêmes qu’en occident, les éditeurs étrangers ignorent souvent la classification originale japonaise d’un manga.

Au Japon, on classifie le type de manga selon l’âge et le sexe du lecteur en 6 classes démographiques distinctes (kodomo, shounen, shoujo, seinen, josei, seijin). En dehors de cette classification officielle, il existe évidemment de nombreux genres et sous-genres mais il serait difficile de vouloir tous les citer, aussi ne retiendrons nous que les principaux types existants.

Kodomo (子供) : tout public jeune (- de 10 ans).
Shōnen (少年) : public masculin jeune (8 à 18 ans).
Shōjo (少女) : public féminin jeune (8 à 18 ans).
Seinen (青年) : public masculin adulte (16 ans +).
Josei (女性) : public féminin adulte (16 ans +).
Seijin (成人) : public adulte (18 ans +).

Gekiga (劇画) : manga dramatique des années 1960-70.
Seinen (青年) : manga pour adultes, avec des graphismes plus réalistes et des sujets plus graves.
Shitei : manga humoristique pour tous âges.
Meka (メカ) : Sous-genre du manga science-fiction, avec des robots géants ou armures humanoïdes.
Mahō shōjo (魔法少女) : Sous-genre du manga fantasy, avec des jeunes filles pratiquant la magie.
Ecchi (エッチ) : manga érotique.
Hentai (変態) : manga sur la pornographie/perversion.
Yaoi (やおい) : manga sur les relations sentimentales/sexuelles entre hommes.
Yuri (百合) : manga sur les relations sentimentales/sexuelles entre femmes.

L’équivalent du manga en Corée du Sud est appelé manhwa et en Chine manhua

Les manga les plus populaires

Quels sont les manga les plus populaires et les mieux vendus ? Difficile de répondre tant les avis divergent en fonction du pays et des personnes. L’attrait pour un manga en Europe, aux USA ou au Japon n’est pas le même. Voici donc une simple liste de manga les plus populaires à l’étranger comme au Japon, sans aucun ordre.

One Piece | Golgo 13 | Black Jack | Dragon Ball | Kochikame | Detective Conan | Naruto | Oishinbo | Hokuto no Ken | Slam Dunk | Doraemon | Astro boy | Touch | Kindaichi Shōnen no Jikenbo | Sazae-san | Captain Tsubasa | Hajime no Ippo | Bleach | Sangokushi | Rurōni Kenshin | Berserk | Highschool of the Dead | Blame ! | Ranma 1/2 | Fushigi Yugi | Death Note | Gantz | Bakuman | Fullmetal Alchemist | Gunnm Last Order | Hidamari Sketch | Tokyo Babylon | RG Veda | Shingeki no Kyojin | 20th Century Boys | Akira | City Hunter | GTO | Monster | MPD Psycho | JoJo’s Bizarre Adventure | Hunter X Hunter | Evangelion | Ghost in the Shell | Ashita no Jō | Elfen Lied | Toriko | Saint Seiya : The Lost Canvas | Tokyo Ghoul | Pandora Hearts | Fairy Tail | Black Butler | XXX Holic | Fruits Basket | Ayako | Gunnm

Le manga One Piece a été vendu à + de 320 millions d’exemplaires

Les principaux éditeurs de manga

Les principales maisons d’édition de manga en France sont :

Glénat | Pika | Kana | Ki-oon | Kurokawa | Kazé Manga/Asuka | Delcourt/Tonkam | Panini Comics | Soleil Manga | Doki-Doki | Taifu Comics/Ototo | Casterman/Sakka | Komikku Editions | Akata | Vertige Graphic | Ego comme X | Cornélius | Clair de Lune Editions | Black Box Editions

Les principales maisons d’édition et magazines de publication de manga au Japon sont :

Akita Shoten | Asahi Sonorama‎ | ASCII Media Works | Broccoli | Bungeishunjū | Bunkasha | Bushiroad | Chikuma Shobō | Chūōkōron Shinsha | Coamix | Core Magazine | Daitosha | Enterbrain | Fujimi Shobō | Fusosha | Futabasha | Gakken | Gentōsha | Hakusensha | Hayakawa Shobo | Hobby Japan | Hōbunsha | Ichijinsha | Kadokawa Shoten | Kōbunsha | Kōdansha | Leed | Libre Shuppan | Mag Garden Comics | Media Factory | Nihon Bungeisha | Ōta Shuppan | Ōzora Shuppan | Seishinsha | Shinshokan | Shinchōsha | Shōdensha | Shōgakukan | Shōnen Gahōsha | Shūeisha | Square Enix | Tezuka Production | Tokuma Shoten | Ushio Shuppan | Wani Books

Prépublication d’un manga

Un manga peu connu n’est généralement pas édité directement en volumes reliés, mais d’abord publié dans divers magazines dédiés et revues spécialisées, voire dans des journaux, comme par exemple Weekly Shōnen Jump (Shūeisha), Weekly Shōnen Magazine (Kōdansha) et Shōnen Sunday (Shōgakukan). Le rythme de publication est variable (mensuel, trimestriel, etc) et habituellement limité à des chapitres allant d’une dizaine à une vingtaine de pages.

Édité principalement en noir et blanc, une série émergente peut être mise en valeur avec des couleurs dans les 1ères pages afin de susciter l’intérêt et la démarquer. Ces publications sont généralement bon marché et éditées en millions d’exemplaires, et l’on en retrouve parfois dans les trains, métros ou cafés ou autres lieux publics.

Si le manga obtient un certain succès auprès des lecteurs, il est réédité en volumes reliés appellés tankōbon (format poche), bunkōbon (format compact) ou wide-ban (format luxe, + grand que le format poche). Si le retour d’un manga est négatif, le mangaka est avertit pour pouvoir réaliser une fin rapide de l’histoire et permettre une parution ultérieure en volumes.

L’industrie du manga

Plus d’un tiers des tirages de l’édition japonaise et près d’un quart de ses revenus est détenu par l’édition du manga, générant ainsi des bénéfices de plusieurs milliards de yens chaque année, et participant activement à l’économie nippone. Véritable phénomène culturel, le manga touche toutes les classes sociales et générations, et l’on estime qu’en moyenne, 1 japonais sur 12 lit au moins 1 manga par semaine.

A titre de comparaison, le populaire Dragonball s’est vendu à + de 230 millions d’exemplaires dans le monde, et le désormais célèbre One Piece est entré au livre Guinness des records en 2014 avec + de 320 millions d’exemplaires vendus, surpassant ainsi Les aventures de Tintin et Milou édités à + de 200 millions d’exemplaires.

Par ailleurs, une véritable industrie de produits dérivés gravite autour des publications les plus populaires, et génère ainsi d’important profits parallèles en proposant jouets, jeux vidéos, anime, collectors, vêtements, et quantité d’autres articles en relation avec le manga.

Les hommes de moins de 30 ans lisent environ 6 mangas par mois, alors que comparativement, les femmes en lisent 3 par mois.

Produits dérivés du manga et évènements

Lorsqu’un manga rencontre le succès, il est généralement adapté en anime ou même en série télévisée (dorama), voire en jeu vidéo. Il arrive toutefois qu’un anime rencontrant le succès soit adapté en manga (ex. Neon Genesis Evangelion).

La multiplication des supports audiovisuels et le marketing aidant, un grand nombre de produits dérivés apparaissent alors sur le marché, tels des peluches, des figurines, des vêtements, et quantité de gadgets et accessoires sur le thème du manga. On trouve par exemple dans les magasins, konbini ou supermarchés de Tokyo, de tout ‘à la sauce One Piece‘, en raison du succès phénoménal de ce manga. Un autre exemple est Hokuto no Ken (Ken le Survivant) dans les nombreux pachinko à travers Tokyo, ou même sur des produits insolites !

Pour les fans de manga, ces produits dérivés font l’objet d’un véritable culte, en particulier chez les hommes. On trouvera ainsi de nombreux objets visant spécifiquement ce public : oreillers géants reproduisant une héroïne sexy d’un manga/anime, artbooks, recueils d’illustrations en couleur incluant images originales, croquis ou même histoires courtes inédites.

La Japan Expo, festival dédié au manga et anime, à rassemblé 247000 visiteurs en 2015

Avec l’émergence du manga à l’étranger et l’intérêt grandissant suscité – en particulier depuis les années ‘2000 – de nombreuses conventions et festivals sont apparus à travers le monde, rassemblant fans et professionnels de l’édition, et proposant de nombreuses activités (jeux, cosplay, vidéo) ainsi que la possibilité d’obtenir des produits et informations supplémentaires sur l’univers du manga. Parmi les évènements francophones les plus connus, on citera notamment la célèbre Japan Expo, ou encore Cartoonist, Epitanime, G.A.M.E. in Paris (France), Tokyo Zone (France), Polymanga (Suisse), etc.

Le manga en France

Le manga est absent du monde francophone jusqu’à son introduction en 1978 par Atoss Takemoto via le fanzine Le cri qui tue, qui publie entre autres Golgo 13, adaptant le sens de lecture aux normes européennes.

Différents éditeurs français tentent sans succès dans les années suivantes la publication de manga, mais ce n’est qu’à la publication d’Akira par les éditions Glénat en 1990, que le public français devient réceptif à l’univers du manga.

Mangazone, 1er fanzine d’information sur le manga est créé en 1990, suivi d’Animeland en 1991 qui devient alors la référence francophone en matière de manga. En 1993, Glénat, fort du succès d’Akira, publie Dragonball et l’année suivante, Ranma ½, suivis d’autres œuvres.

D’autres maisons d’édition commencent alors à s’intéresser au manga et de nombreuses œuvres sont traduites et publiées, dont RG Veda (Tonkam editions – 1er éditeur à adopter le sens de lecture japonais qui deviendra la norme), Detective Conan, Hokuto no Ken, Evangelion, Nicky Larson, Captain Tsubasa, Kenshin le Vagabond, Ghost in the Shell, Black Jack, Slam Dunk, Yu-Gi-Oh!, etc.

La France est depuis 2006 le 2ème consommateur mondial de manga après le Japon

Les années 2000 marquent l’implantation du manga dans l’univers de la bande dessinée en France, de nouvelles séries à succès sont traduites et publiées (Hunter × Hunter, One Piece, Gunnm Last Order, Fruits Basket, Naruto, Bleach, etc), et de nouveaux magazines spécialisés et sites internet apparaissent. Entre 2001 et 2008, les ventes de manga en France quadruplent pour finalement diminuer de 15% entre 2008 et 2011. Si 2012 fut à nouveau plus profitable au marché du manga en France, les années suivantes furent en revanche marquées d’un léger recul des ventes, mais le manga demeure néanmoins à la 2nde position des secteurs de l’édition les plus dynamiques et représente approximativement 26% du chiffre d’affaires de la bande dessinée en France.

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